Cielbleu présenté par un tiers

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De mon vrai nom, je m'appelle Samir ibn Rafiq ibn Abd'Grenth. Samir signifie "homme de bonne compagnie", mon père s'appelait Rafiq, ce qui veut dire "ami sûr" et son père s'appelait Abd'Grenth, "la créature de Grenth". Mon histoire est longue mais finalement assez simple.
Mon arrière-grand-père, Souverain d'Amnoun, avait été blessé gravement sur le champ de bataille alors que son épouse était enceinte et il voulait voir naître son enfant, son troisième fils, alors il jura devant Grenth qu'il lui consacrerait l'enfant s'il survivait assez longtemps pour le voir grandir. Cet enfant, mon grand-père, était donc préparé à être un prêtre de Grenth et un enseignant de la nécromancie, mais ses frères aînés mourrurent de maladies et il devint donc Souverain d'Amnoun. Il était bien sûr fort sombre pour assurer de telles tâches et il s'entoura sagement des meilleurs conseillers, qu'il appela ses "Rafiq". Pour les honorer, il donna aussi ce prénom à son premier fils, né d'une épouse qu'il avait choisie parmi les plus tendres et les plus protectrices des élémentalistes de la terre. Il donna aussi aux femmes le droit d'exercer des fonctions politiques, ayant remarqué qu'elles ont moins souvent recours à la violence que les hommes.
Mon père, très entouré dès son plus jeune âge, n'avait pas un caractère très fort. Comme Amnoun prospérait, cela ne se remarquait guère. Il était un bon souverain tant qu'aucun problème ne surgissait. Ses deux premiers enfants, mâles, lui ressemblaient. Ma soeur Rhania et moi-même avons tous les deux remarqué très jeunes que la moindre crise ferait vaciller l'Etat. Il fallait plus de caractère pour diriger. Je me suis lancé dans la carrière militaire avec l'espoir de devenir le bras droit de mon frère aîné lorsqu'il serait souverain ; j'aurais été le pilier du trône, vigilant en temps de paix, inflexible en temps de crise. Ma naissance et mes qualités m'ont vallu le commandement de la cavalerie légère d'Amnoun, la troupe mobile sur laquelle le sort de toute bataille reposerait. Mes soldats m'ont donné le surnom "Al Rhamane", le Miséricordieux, car je ne faisais jamais souffrir mes ennemis. Ceux qui se soumettaient étaient pardonnés, ceux qui persistaient dans leurs fautes étaient promptement éliminés.
Ma soeur rechercha plutôt le pouvoir pour elle-même ; étant la troisième enfant, elle s'auto-proclama "l'aînée parmi ceux capables de régner". Les intrigues de palais n'avaient pas de secret pour elle, pas plus que les plus puissants sortilèges de tous les types de magie. En effet, elle avait depuis l'enfance suivi les traces de mon grand-père et de son épouse favorite, développant simultanément la magie des éléments et la nécromancie. Pour s'assurer un traitement de faveur à l'académie et des études aussi rapides que son talent et sa soif de pouvoir l'exigeaient, elle tenta de plaire à un des jeunes assistants du directeur. Voyant qu'il était imperméable à son charme, elle obtint son estime en séduisant son frère adoptif. Il s'agissait d'Amal-ed-Din et d'un jeune homme qui prendrait plus tard le nom de Cielbleu, fils de teinturiers, roturiers n'intéressant nullement Rhania mais instruments utiles dans sa quête de pouvoir.
Elle fit venir Amal-ed-Din et Cielbleu au Palais, en de nombreuses occasions. Elle les présenta à ses frères et soeurs, à nos parents, elle en fit l'éloge devant les ministres. Amal-ed-Din reçut le titre de docteur en envoûtements plus jeune qu'aucun autre avant lui, nul ne sait si l'influence de Rhania y fut pour quelque chose. Ce que je sais, c'est que lui et moi étions franchement camarades à cette époque.
Rhania commença alors à conspirer contre mon frère aîné. Elle espérait manipuler Amal-ed-Din et Cielbleu pour les inciter à faire sombrer l'héritier du trône dans la folie. Ses propres pouvoirs magiques ne suffisaient pas et, de plus, elle risquait de se faire repérer par les magiciens de la Cour si elle s'employait elle-même à la basse besogne. Amal-ed-Din n'a pas hésité une seule seconde à venir me parler des projets que Rhania lui avait laissé sous-entendre. C'est alors que j'ai fait la plus grosse erreur de ma vie : j'ai couvert la faute de ma soeur pour éviter le déchirement de la famille. J'ai dit à Rhania que ses plans étaient connus de moi mais que je la dénoncerais seulement si elle persistait. Elle m'a promis de renoncer. Les effets n'allaient pas se faire ressentir sur ma famille, mais plutôt sur celle d'Amal-ed-Din et de Cielbleu.
Du jour au lendemain, on ne vit plus les deux frères au Palais. La population y vit une certaine disgrâce et cela a nuit aux affaires des parents, à la carrière de l'envoûteur mais surtout à Cielbleu. Apprenant qu'il avait été abusé, il a presque perdu la raison et n'a retrouvé son équilibre qu'après de longues années chez les moines de Balthazar. Il avait gardé un bégaiement persistant de ce traumatisme, mais j'ai appris que maintenant il ne bégayait plus qu'occasionnellement. Amal-ed-Din a compris mon attitude, mais notre amitié a malgré tout pris un méchant coup. J'ai protégé ma soeur, il a protégé son frère, nous ne nous sommes plus revus pendant de longues années.
Ma soeur a fini par arriver à ses fins, cependant. Après le décès de notre père, elle mit une telle pression sur l'héritier que celui-ci renonça au trône à son profit. Je m'étais ouvertement opposé à elle pendant cette querelle de succession qui dura de longs mois. J'étais donc réduit à l'exil, puisqu'elle ne se satisferait que de ma mort, à présent. J'ai fui à l'île de Shing Jea, où le Maître Togo m'a appris que je possédais un potentiel de magicien pour invoquer les esprits. Cette magie étant inconnue en Tyrie, ce n'était pas surprenant que personne ne s'en était jamais aperçu. Les gênes de mon grand-père Abd'Grenth ne m'ont pas fait défaut, non plus, ce qui explique mon habileté à lever des armées des squelettes. Après toutes ces années, j'ai retrouvé Amal-ed-Din et il m'a cordialement admis dans sa guilde. Même Cielbleu, devenu un puissant moine de Balthazar, a bien accueilli ma présence. J'ai reposé pied en Tyrie, mais ma vie ne tiendrait qu'à un fil si je passais par l'Oasis d'Amnoun où, sur le trône, une menace au corps de femme ourdit d'autres plans pour accroître sa domination.
Maintenant Cielbleu a quitté la Tyrie et répand, dit-on, la sérénité et la justice en Hyborie en tant que chaman de l'ours. Ses confrères s'étonnent de sa maîtrise des langues stygiennes, mais peut-on s'étonner de la diplomatie d'un homme qui revient d'aussi loin affectivement et spirituellement ? L'Hyborie lui a permis de goûter aux secrets de l'acier, une joie nouvelle dont il s'enorgueillit désormais. Partout où il va, son coeur appartient à une fière guerrière du nord, nommée Hydrille, la solide et taiseuse Hydrille, dont il est l'éternel fiancé.
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